L’innovation suisse pour promouvoir l’intégrité des écrits

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Eugène Schön

10.05.2017
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La startup OrphAnalytics a développé une approche novatrice capable de détecter de façon autonome le ghostwriting, un phénomène qui touche un nombre croissant de domaines. Forte de son expertise, l’entreprise valaisanne se prépare à implémenter sa solution à la HES-SO pour l’année académique 2017-2018. Notre rédaction a eu l'opportunité de faire le point avec Claude-Alain Roten sur les applications de la technologie de la startup et ses projets.

Pouvez-vous parler de la collaboration mise en place avec la HES-SO ? Depuis quand a-t-elle débuté ?

Fin 2015, des contacts avec la Haute École Spécialisée de Suisse Occidentale (HES-SO) ont permis de mesurer son intérêt à renforcer la stratégie de respect par les étudiants des bonnes pratiques d’écriture de documents professionnels. Des logiciels sont en place pour rechercher les textes plagiés (insertion frauduleuse de publications non référencées). La startup OrphAnalytics SA a présenté à la HES-SO son approche novatrice capable de détecter de façon autonome du ghostwriting (rédaction non-autorisée d’un document de certification par un professionnel).

Les applications stylométriques d’OrphAnalytics mesurent le style d’un document pour le comparer à ceux de documents de référence. Ne nécessitant pas de base de données de publications, l’approche permet d’authentifier tout ou partie d’un document par le repérage de changements de style présents dans le texte de certification ou entre différents documents d’un candidat. Deux phases pilote ont été mises en place avec la HES-SO pour optimaliser le logiciel de détection de ghostwriting aux documents rédigés par les étudiants. La première phase d’exploration est terminée et la deuxième est en cours pour préparer l’implémentation de la solution prévue pour l’année académique 2017-2018.

L’intérêt de la HES-SO pour les analyses textuelles n’est pas induit par un comportement abusif de ses étudiants. Pour la HES-SO, la mise en place d’outils de détection de fraude vise à renforcer la confiance du public et des étudiants dans la qualité des formations proposées et des titres délivrés par les différentes HES.

Quelle que soit l’institution de formation, un étudiant qui triche en mandatant les services d’un ghostwriter pour la rédaction d’un texte obtient généralement une très bonne note pour ce rapport écrit frauduleusement par un professionnel. A contrario la note d’un rapport d’étudiant sans expérience d’écriture professionnelle est plus faible dans la majorité des cas. Par conséquent, le fraudeur présentant de meilleures notes académiques est avantagé lors du démarrage de sa carrière professionnelle. Pour lutter contre cet avantage donné par la fraude, la HES-SO aimerait analyser les textes des étudiants afin qu’ils puissent documenter par la suite leur respect des bonnes pratiques académique, gage de future intégrité professionnelle.

Ces valeurs de promotion d’intégrité pour les futurs acteurs économiques sont essentielles pour les fondateurs d’OrphAnalytics; l’objectif de la startup étant de promouvoir le respect des bonnes pratiques éthiques dans le monde scientifique, économique et politique.

Pouvez-vous décrire en quelques mots ce que fait votre entreprise, notamment dans les domaines de l’investigation, de l’analyse de contenus et d’expertises ?

Adaptés aux contraintes académiques, les outils d’analyses textuelles peuvent servir également aux enquêtes de police ou aux traitements d’affaires judiciaires. Par exemple, les informations stylométriques permettent de prendre des décisons rapides en fonction des besoins d’une investigation. Pondérées par statistiques, elles permettent également aux acteurs judiciaires de valider ou non les preuves textuelles apportées.

En 2016, OrphAnalytics SA a été mandatée pour se prononcer sur le mécanisme d’une importante escroquerie dans le cadre d’un arbitrage international. Les spécialistes d’OrphAnalytics devaient se prononcer sur l’auteur de fragments de contrat représentant 3’000 caractères en tout. Comme les collaborateurs d’OrphAnalytics allaient pour la première fois servir pour une cour de justice, ils ont demandé aux mandants de faire une analyse préliminaire. Ils s’assuraient ainsi de la faisabilité de l’analyse sur ce type de texte. Les premiers résultats obtenus sans connaître le contexte ont convaincu les mandants de s’assurer les services d’OrphAnalytics. Les résultats finaux stylométriques ont confirmé ceux de trois autres groupes de spécialistes mandatés : impression et format de documents, psychanalyse forensique et investigation. Après lecture du rapport d’expertise, les mandants ont recommandé aux experts d’OrphAnalytics de collaborer avec des institutions de police scientifique afin de partager leur savoir-faire. D’autres expertises sont en cours pour instruire des affaires académiques.

Un projet de validation est en discussion actuellement pour un échange entre expériences de stylométrie et de quantification des probabilités des résultats. Ce projet transdisciplinaire vise à intégrer dans les logiciels les fonctionnalités qui permettront aux juges et aux avocats d’apprécier une comparaison statistique.

Pouvez-vous donner d’autres exemples de collaborations ?

Si le savoir-faire d’OrphAnalytics permet de débusquer des tricheurs, il peut également servir dans le monde de l’édition afin de favoriser les auteurs qui rédigent les textes qu’ils signent. Une initiative a été mise en route, Textuellement Tranparent qui permet aux auteurs de montrer à leur public qu’ils sont les rédacteurs de leurs textes. Le politicien français François Bayrou a été le premier à accepter de se faire stylométrer, pour montrer qu’il est un des rares politiciens français à écrire ses textes. D’autres auteurs sont intéressés par cette initiative.

D’autres collaborations sont en cours actuellement. Certains résultats sont publiés comme l’analyse des romans publiés sous le pseudonyme Elena Ferrante.

Quand est née votre entreprise ? Combien de collaborateurs employez-vous ?

OrphAnalytics SA a été créée en 2014 par une quarantaine de fondateurs, coachée par l’incubateur de la Fondation The Ark à Martigny. Le capital nécessaire à la fondation a donc été rassemblé par un processus de crowd-funding.  Sans besoin d’apports importants, cette entreprise a été financé par le réseau familial, par des amis de longues dates et par d’anciens collègues de travail de Claude-Alain Roten. Le financement de la croissance d’entreprise est essentiellement planifié par autofinancement pour le moyen terme.

L’entreprise se distingue par l’emploi de collaborateurs séniors. Compétents, proactifs, ils sont rassemblés autour des valeurs d’intégrité prônée par la startup. L’entreprise d’expertise textuelle profite des compétences d’un noyau de spécialistes formés aux analyses de signal nécessaires à l’exploration génomique. Actuellement, 6 à 10 personnes sont employées par OrphAnalytics à temps partiel pour son management, le développement de logiciels et la rédaction d’expertises académiques et judiciaires. Une demande de protection intellectuelle a été déposée.

Quelles sont les perspectives des prochains mois pour Orphanalytics ?

Aux projets déjà décrits s’attachant à authentifier un document s’ajoute le développement d’une application destinée à mesurer la complexité d’un texte. Ce logiciel servira aux institutions qui veulent produire des documents adaptés à leur public afin de s’assurer d’un transfert optimal d’information. À plus long terme, la technologie sera adaptée pour documenter les pages Web afin de les valoriser.

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